dimanche 30 novembre 2014

Parler français sans PKP


Pierre-Karl Péladeau propose de transformer notre province en pays « français, juste et prospère ». Or, il s’avère que je vis déjà dans un pays juste et prospère (qui a ses défauts, mais aussi ses qualités), en plus d’avoir la chance de pouvoir m’exprimer en français sans aucune contrainte ou difficulté.

En fait, la principale menace à ma langue vient surtout des unilingues francophones qui ne maîtrisent même pas le français et qui le massacrent quotidiennement. Que ce soit sur Facebook ou Twitter, en s’exprimant tout haut en public ou en silence par texto, notre langue est sérieusement menacée par ceux-là mêmes qui devraient la protéger.

Nous pouvons être bilingues – voire trilingues – et être élevés dans un milieu multiculturel et éclectique sans en perdre notre latin. Non seulement est-ce possible, c’est même désirable puisque c’est enrichissant et ça aide au développement de nos capacités intellectuelles. Parler une langue, c’est bien. Mais deux, c’est mieux.

Le fait français est si bien établi en notre province et dans notre pays que celle qui vient d’être élue à la tête de l’Organisation internationale de la Francophonie est Michaëlle Jean, une Canadienne francophone.

Le fait français est d’une telle beauté que nous pourrions l’utiliser comme outil pour nous propulser sur la scène internationale et rendre envieuses les autres provinces que nous avons contribué à fonder.

Le fait français, ici, fait partie intégrante de notre identité. Il est si fort qu’il peut autant attiser les moqueries comme celles de Sugar Sammy qu'être une puissante source de fierté comme notre Louis Cyr.

Mais le fait français n’est pas une honte ni une raison de se séparer du Canada. Il en est, au contraire, une pierre angulaire. Le fait français n’est pas une limite, mais une base sur laquelle nous pouvons construire notre identité québécoise et canadienne à travers le monde.

En tant que Québécois, je me trouve chanceux de pouvoir multiplier la richesse des cultures qui m’ont forgé et qui m’entourent, plutôt que de les considérer comme des ennemies. Je n’ai pas besoin de souveraineté, je n’ai pas besoin d’unilinguisme pour me protéger. Je n’ai surtout pas besoin d’un PKP opportuniste pour me promettre un « pays français ».

En fait, j’aimerais que nous soyons plus nombreux à mieux maîtriser notre langue, à la mieux parler et, surtout, à la mieux écrire. Car ce ne sont pas les étrangers qui arriveront à l’anéantir, mais seulement nous qui la laisserons mourir.

samedi 22 novembre 2014

Un badge pour tuer impunément


Plusieurs choses ne marchent pas dans l'histoire du policier qui a tué un enfant en fonçant à 120 km/h sur l'auto dans laquelle il se trouvait en février dernier. En fait, tout cloche et tout porte à croire que le policier est entièrement à blâmer. Mais le DPCP en a décidé autrement et plusieurs ragent parce qu'ils n'arrivent pas à s'expliquer cette injustice.

C'est frustrant, et c'est extrêmement difficile de porter un regard neutre et de rester objectif dans un cas comme celui-ci. Surtout lorsque les circonstances sont troublantes et qu'un enfant est mort de façon violente. Or, en ne s'en tenant qu'aux faits (ceux que nous connaissons, du moins), on réalise que notre colère est justifiée.

Les faits

Il a été établi que le policier roulait à plus de 120 km/h dans une zone où la vitesse est limitée à 50 km/h. Il a été établi qu'il ne répondait pas à une urgence et qu'il était plutôt sur une opération de filature -- importante certes, mais pas urgente.

Le Directeur des poursuites criminelles indique égalemet que « La chaussée était sèche, la visibilité était bonne et le feu de circulation auquel faisait face le policier était vert. »

Quand au père, on lui reproche de s'être engagé « dans l'intersection alors qu'il n'avait pas de feu prioritaire dans une manoeuvre qui n'était pas sans risque. »

Remise en contexte

Ces faits isolés indiquent que le père pourrait avoir causé l'accident. Or la collision ne s'est pas produite dans un tube sous vide au milieu de nulle part. La collision s'est produite à une intersection en milieu urbain.

Et c'est ça qui fait toute la différence!

Il y a une raison pourquoi nous limitons la vitesse en milieu urbain. Non seulement quelqu'un peut brûler un feu rouge alors que vous aviez pourtant la priorité, mais un chien pourrait aussi traverser la rue, un enfant pourrait surgir de nulle part pour attraper son ballon, un piéton pourrait ne pas vous avoir vu venir et s'engager dans l'intersection.

Il y a une panoplie de tels exemples où un imprévu vous force à réagir subitement.

À 50 km/h, vous pouvez vous immobiliser ou dévier votre trajectoire. Au pire, vous pourriez foncer dans une voiture stationnée pour éviter un obstacle. Ou encore frapper un piéton innocent, mais à une vitesse où il a plus de chances de survivre.

À 120 km/h, ça ne pardonne pas. Toute tentative de freiner sera vaine. Toute manoeuvre d'évitement vous conduira dans le décor à une telle vitesse que vous mettrez en péril la vie des gens autour, la votre incluse. Vous pouvez faire des tonneaux, traverser un mur de brique et finir par vous immobiliser au milieu d'un salon plutôt qu'à l'intersection.

Les urgences

Les policiers, ambulanciers et pompiers sont formés pour manoeuvrer à de telles vitesses, c'est vrai. Mais leurs véhicules sont également équipés de sirènes et de gyrophares pour avertir du danger, pour prévenir les autres conducteurs et les piétons de leur arrivée subite, pour que l'on s'attende à les voir passer comme une flèche et que nous ayons le temps de nous enlever du chemin.

Le brave flic, ici, n'a pas activé ces signaux d'urgence, si son véhicule en était équipé. Personne ne pouvait prévoir son arrivée. Lui-même ne pouvait plus faire une manoeuvre d'évitement en cas d'urgence. Il n'avait plus le contrôle de son véhicule.

Même si le père a traversé sur la rouge et que c'était risqué, c'est le policier qui a causé cet accident en n'avertissant pas de sa conduite dangereuse en milieu urbain et en étant incapable de garder le contrôle de son véhicule.

Le policier est directement responsable de la mort d'un enfant qui, en d'autres circonstances, aurait probablement survécu à une collision à une vitesse normale, ou dont le père ne se serait pas retrouvé dans la trajectoire d'un véhicule d'urgence si une sirène avait été audible.

La suite

Ce policier semble coupable. Il devrait au minimum subir un procès afin qu'il soit jugé et que tous les faits soient étudiés. Que le DPCP le protège ainsi est inacceptable.

La pression médiatique sera palpable et les élus devront réagir. De plus, les citoyens rageront (avec raison) de voir qu'un simple badge a évité à un chauffard de subir les conséquences de ses gestes et d'aller réfléchir en prison à la façon dont on doit conduire un véhicule quand nous ne sommes pas seuls sur la route.

Un autre chauffard accusé de conduite dangereuse causant la mort voit la couronne recommander une peine de prison de 6 ans. Pourquoi épargner cela au policier? Pourquoi ne pas envoyer un policier en prison? S'il y a des circonstances atténuantes, voire des faits qui prouvent son innocence, qu'on le démontre dans un procès juste. Juste pour le père et juste pour l'enfant mort aussi.

Mais un badge n'est pas une preuve d'innocence.